Excellence monsieur le ministre
C’est avec enthousiasme que j’ai accueilli votre promotion à la tête du ministère de la culture car à mon avis, vous êtes un bon choix pour occuper ce poste au regard de votre parcours professionnel en général et dans le domaine culturel en particulier, votre compagnie de théâtre » les sardines de Conakry » constituant un exemple éloquent.
Néanmoins, j’attire votre attention sur l’importance des charges qui pèsent sur vos épaules, loin de moi l’idée de m’ériger en donneur de leçons. J’aimerai par cette lettre ouverte, vous suggérer quelques propositions de réformes afin de redorer le blason de cet important secteur.
La Guinée a, aux lendemains de son indépendance, a occupé une place centrale en la matière grâce à la clairvoyance de Fodéba Kéita, fondateur des ballets africains de Guinée et coauteur de l’hymne national ainsi qu’au génie et au talent de vaillants artistes comme Italo Zambo, Jeanne Mccauley pour ne citer que ceux là. La culture était une source de devise non négligeable pour notre pays.
Aujourd’hui, ce secteur a besoin d’être reformé afin que notre pays retrouve son lustre d’antan car la culture est une importante valeur ajoutée et un vecteur important de croissance économique.
En France, la culture joue un rôle de premier plan dans le domaine économique. Si l’on se réfère au chiffre de l’inspection générale des finances (IGF) et de l’inspection générale des affaires culturelles (IGAC), elle apporte 3,2 % au produit intérieur brut ( PIB) soit 57,8 milliards d’Euros à la richesse nationale et 670000 emplois (2 ,5 % de l’emploi en France ) .
Pour plus d’efficacité d’action, je suggère que la culture et le tourisme soient regroupés au sein d’un même ministère car l’attractivité d’un pays va de pair avec la culture de son peuple. Un certains nombres de réformes doivent également être entreprises : dans le domaine cinématographique, dans le domaine de la construction et de la réhabilitation d’infrastructures culturelles, la formation des professionnels du secteur ainsi que l’organisation d’événements culturels panafricains et mondiaux.
La réhabilitation des salles de cinéma. La construction et l’équipement d’un studio national de cinéma permettant de produire des œuvres cinématographiques nationales en l’instar de Nollywood au Nigéria. Choisir un jour dans la semaine qui sera consacré à la projection de films dans les différentes « salles obscures » du pays tout en privilégiant les productions nationales. S’inspirer des exemples Burkinabés et nigérians dans le domaine.
1) La construction d’un palais de la culture
Construire un palais dédié à la culture à l’image du palais de la culture d’Abidjan. Une salle polyvalente devrait être construite afin d’éviter les drames que le pays a connus sur certaines plages de la capitale. Ce palais devrait servir de salle de spectacle aux artistes chanteurs et musiciens guinéens mais aussi à notre pays d’organiser des festivals de musiques africaines voir mondiales.
2) Des bibliothèques
Construire des bibliothèques dans chaque grande commune du pays afin de démocratiser l’accès à la culture : Se former et s’informer devraient être la nouvelle ligne. Valoriser les productions littéraires nationales.
3) Construction d’un théâtre national
Une maison dédiée à la dramaturgie devrait être un nouvel outil au service des hommes et femmes exerçant dans ce secteur de la culture.
4) Construction de musées
Un musée regroupant le patrimoine historique et culturel dans chaque grande cité du pays : construire un musée de l’histoire précoloniale, coloniale et aussi de l’indépendance de notre pays à Conakry.
A l’instar de l’institut national supérieur des arts et de l’action culture de Côte d’Ivoire, un établissement académique public devrait être créé afin de former des artistes et opérateurs du secteur des arts et de la culture en général.
Il devra regrouper en son sein : l’École nationale de musique (un conservatoire), l’École nationale des beaux-arts, l’École nationale de théâtre et de danse et l’École de formation à l’action culturelle.
Après la construction du palais de la culture, la Guinée devrait dorénavant organiser les » koras awards » : cérémonies récompensant les meilleurs artistes africains de l’année. Depuis plusieurs années, cet événement n’est plus organisé sur le continent. L’organisation d’un tel événement fera mieux vendre l’image de notre pays et constituera un coup de fouet au secteur de la culture. La kora symbole de ce trophée étant un instrument faisant partie du patrimoine culturel Guinéen.
La Guinée devrait se positionner pour l’organisation d’événements afin de faire découvrir le pays et relancer le secteur du tourisme. A l’image du « Fespaco » au Burkina Faso ou du Festival des arts nègres du Sénégal, la Guinée devrait s’inscrire dans cette ligne car il n’y a que de cette façon que les lumières du monde entier seront braquées sur notre beau pays.
Comme noté en préambule de cette lettre, voici en bref ma vision en ce qui concerne le secteur de la culture. Toute œuvre étant perfectible, j’espère ouvrir un débat afin de faire bouger les lignes.
Pour conclure, je vous prie de bien vouloir agréer monsieur le ministre l’expression de mes sentiments les meilleurs.
Abdoul Sylla (Lyon en France)