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Pourquoi Sadio Barry ne pouvait rallier Alpha Condé et son RPG.

septembre 17th, 2015 | par Leguepard.net
Pourquoi Sadio Barry ne pouvait rallier Alpha Condé et son RPG.
Politique
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Sadio Barry :  « C’est en 1991, alors étudiant, que j’ai quitté Alpha Condé et le RPG »

 

 

C’est déjà depuis 1991, avant même l’existence officielle du RPG, que j’ai eu la conviction, preuves à l’appui, que si par malheur, le RPG (Rassemblement Démocratique de Guinée) accédait un jour au pouvoir dans notre pays, notre héritage commun, à savoir le sentiment d’appartenir à une seule et même Nation allait voler en éclats. Par la suite aussi, en 1996, j’en avais averti les Guinéens sur le forum de Boubah (actuel Guineenews).

En effet, en 1991, c’était Sékou Souapé Kourouma lui-même qui m’avait conduit, avec mon ami Abdoulaye Keita de Fria, à l’hôtel Niger de Conakry pour rencontrer Ahmed Tidiane Cissé avec qui il nous avait priés et convaincus de créer une branche estudiantine du mouvement RPG à Conakry. Ce mouvement avait pour but déclaré, de chasser les militaires du pouvoir et instaurer un Etat démocratique en Guinée.

Les étudiants que nous étions venions d’être déçus par le Forum de l’opposition dirigé par Bah Mamadou qui avait déclaré ne pas être en solidarité avec les étudiants en grève, allant jusqu’à refuser qu’on fasse des photocopies de nos lettres ouvertes à leur siège. C’est moi, en collaboration avec Sékou Souapé, qui ai fondé la branche universitaire du RPG à Conakry dont Siaka Cissoko occupera la présidence plus tard, la première section de Dixinn et celle de Fria avec le directeur de l’hôpital d’Etat d’alors parmi les cadres que j’avais réussi à recruter.

Vu que dans notre groupe, majoritairement malinké, personne ne semblait oser parler ouvertement du mouvement d’Alpha Condé et distribuer ses publications (posters et tracts), c’est moi qui ai occupé le secrétariat en charge de l’information tout en continuant mon travail de recrutement et d’implantation du mouvement. C’est ainsi que je fus parmi ceux qui ont travaillé sur le terrain pour préparer l’arrivée d’Alpha Condé le 17 mai 1991 et son meeting avorté du stade de Coléah.

A sa résidence à Mafanco, Alpha Condé qui prit la parole ne demanda qu’après une seule personne : « Sadio Barry », qu’il qualifia de meilleur à tous en Guinée. C’est cette appréciation de ma personne par Alpha Condé, au dire de Sékou Souapé Kourouma, qui fut à l’origine du complot que certains responsables du RPG et mes collègues malinkés du bureau ont planifié et exécuté contre moi.

Ils attendirent que je parte en congé à Fria pour demander une réunion extraordinaire en urgence avec le camarade Alpha Condé en personne. Le Président du bureau, Siaka Cissoko, présenta alors un dossier d’accusation et une résolution d’exclusion « prise à l’unanimité par le bureau » contre Sadio Barry pour haute trahison. Deux soi-disant témoins-clés des faits furent présentés par M. Cissoko : Kalil Camara et Abdoulaye Koné. Monsieur Cissoko prit le soin d’ajouter que Sadio Barry avait été confronté à la vérité et avait reconnu les faits. Ce qui aurait amené le bureau à prendre contre lui les mesures qui s’imposaient. « D’ailleurs, ajoute Siaka Cissoko, Sadio Barry en question est actuellement en mission de Bah Mamadou à Fria. Il y est allé dans la voiture, une Peugeot 504 blanche, que Bah Mamadou lui a offert ».

Après avoir écouté M. Cissoko et les autres membres du bureau, Alpha Condé qui souligna qu’il ne voudrait pas perdre quelqu’un comme Sadio Barry, rappela mon apport au RPG et demanda au bureau de me pardonner en m’accordant une nouvelle chance.

A mon retour des congés, Sékou Souapé m’informa de la tenue d’une réunion du bureau en présence d’Alpha Condé. Ignorant du complot dont j’avais été victime en mon absence, je viens à la réunion où je rendis compte du travail hors-programme que j’ai effectué à Fria en y mettant en place un bureau provisoire dirigé par le directeur de l’hôpital préfectoral de la ville. Je détenais en plus une liste de nouveaux adhérents que j’ai recrutés dans le mouvement RPG à l’occasion de ce déplacement.

Alpha Condé qui présidait la réunion fit part de son étonnement, parce que deux semaines avant, on lui avait fait part de mon exclusion pour haute trahison. Il souleva lui-même le problème en demandant aux autres membres du bureau de s’expliquer devant moi. Chacun se mit à indexer l’autre. Fâché, Alpha Condé suspendit la séance et renvoya le bureau à régler le problème avant la fin de la semaine.

C’est ainsi que mes collègues, sans vouloir qu’on parle de ce qui s’est passé, dirent qu’ils se sont trompés dans leur jugement et me présentèrent des excuses en demandant qu’on oublie ce qui s’est passé pour aller de l’avant.

Tenant à connaître les accusations qui ont été portées contre moi à mon insu ainsi que les motivations de celles-ci, j’avais alors porté plainte contre le groupe auprès du Bureau National du RPG. Ce dernier se réunit alors à Mafanco et nous convoqua tous.

C’est seulement ce jour que j’ai découvert toute la vérité sur le complot qui avait été fomenté et ourdi contre moi. Mes « collègues malinkés » reconnurent avoir perfidement fabriqué l’histoire de toutes pièces afin de m’écarter vu le poste stratégique que j’occupais et la confiance grandissante d’Alpha Condé en moi, pour protéger le mouvement d’un « Peul » qui pourrait éventuellement trahir au profit de ses parents Diallo Siradiou ou Bah Mamadou. Ils firent même des observations sur le fait que l’on me voyait toujours lire les lettres ouvertes de Bah Mamadou contre le régime militaire au pouvoir.

Après avoir écouté tout le monde, les responsables du bureau national, appelés « sages du RPG », se concertèrent une quinzaine de minutes avant de rendre leur jugement :

« Après avoir attentivement écouté chacun et analysé le problème en profondeur, nous ne pouvons donner tort à personne. Les uns ont voulu sacrifier un membre du groupe pour préserver les intérêts du parti en émergence. Ils ont agi par souci et avec la volonté de servir la cause qui nous réunit. Sadio quant à lui, a prouvé sa fidélité et sa détermination à rester membre du RPG qu’il continue de servir loyalement. Nous vous félicitons donc tous et vous exhortons à considérer cette histoire comme définitivement close. Nous allons rendre compte au Secrétaire général (Alpha Condé) ».

Alors, avant qu’ils ne lèvent la séance, j’ai pris la parole :

« Chers membres du BN et responsables nationaux du RPG, c’est çà votre façon de juger? Comment pouvez-vous comprendre et féliciter des personnes qui disent avoir eu des motivations ethniques pour calomnier et sanctionner un collègue, un Guinéen comme eux dont le tort n’est que d’appartenir à une autre ethnie que la leur, la vôtre ? Si c’est cette justice que vous voulez instaurer en Guinée, alors ne comptez plus sur ma contribution à moi dans votre projet politique. Je démissionne sur le champ. »

Beaucoup d’étudiants des autres ethnies qui ont assisté au jugement démissionnèrent aussi en bloc.

Alpha Condé indiquera après, qu’il refuse d’accepter ma démission et me prie de rester dans le RPG, avec lui. Je répondis alors à Alpha Condé que je continue d’avoir de l’estime et du respect pour lui, mais que s’il aime la Guinée, il doit renoncer à conquérir le pouvoir avec ce mouvement qui est devenu un regroupement de haineux et de racistes malinkés. Je priai donc Alpha Condé d’éviter de porter un tel regroupement ethnique au pouvoir en Guinée. Sinon, lui dis-je, notre pays en souffrirait terriblement sur tous les plans. Sékou Souapé Kourouma a été témoin et porteur de tous nos échanges.

En 1996, avant donc les élections de 1998, Alpha Condé a fait une tournée de campagne aux Etats Unis et en Europe. A Dortmund, en Allemagne, il était attendu à 10h, mais n’arrivera qu’après 16h. Des Guinéens de toutes les sensibilités et amis non-Guinéens étaient venus l’accueillir et écouter son discours d’opposant. Il faisait chaud et la salle était pleine. Tout le monde était fatigué et assoiffé. Après 15h, les responsables du RPG se décidèrent enfin de servir au moins des boissons, ce qu’ils ne voulaient pas faire avant l’arrivé de leur leader. Les serveuses du RPG reçurent des consignes de ne servir à boire qu’aux Malinkés. En guise de Protestation, ma réaction avait été très simple. J’ai attendu qu’on serve à Alpha Condé à boire, pour venir à la table officielle, devant toute l’assistance, et m’emparer de son verre pour me désaltérer. J’y étais avec mon ami malinké Mohamed Bamba. Lui et moi avions dénoncé cela à l’époque sur le Forum de Boubah.

Ce jour à Dortmund, quand il a  su les raisons de mon action, Alpha Condé lui-même dénoncera dans des termes  très durs les comportements et le racisme de certains malinkés qui, selon lui,  seraient les premiers ennemis du RPG.

Jusqu’à la transition 2010, j’avais une peur bleue du RPG, mais une certaine estime pour la personne d’Alpha Condé. Autant fut grande ma déception lors que pendant les campagnes de 2010, Alpha Condé en personne se mit à stigmatiser les Peuls dans l’ensemble, fit des  démarches régionalistes contre les Foulbé et le Fouta en lieu et place d’alliance politique et incita à la haine et à la violence anti-peules dans tout le pays.

Propos d’Alpha Condé rapportés par le journal « Le Monde » du 2 sept 2010:

« Je suis soutenu par la Basse et la Haute Guinée et la Guinée forestière. C’est l’expression du refus de la volonté de domination des Peuls ».

Alpha Président, fonda son régime sur du régionalisme, le favoritisme et des exclusions ethniques, fit fonder et soutenir, avec des moyens de l’Etat, des mouvements anti-peuls « Manden Djalon » et « Union des Roundès » en provoquant des violences et une profonde déchirure du tissu social au Fouta et dans le reste du pays, recrute et entretient une milice donzo avec des criminels dont on a vu la dangerosité dans des pays voisins qui ont été déchirés par des guerres civiles.

Le 9 mai 2015, Alpha Condé s’adresse aux Malinkés à Kankan :

« Si vous avez accepté le gouverneur Nawa Damey, alors qu’il est forestier, c’est parce que la Guinée appartient aux Malinkés, aux Forestiers et aux Soussous ! ».

Dans le même discours, il dit aux populations de la Haute Guinée que lorsqu’il venait au pouvoir, les Malinkés, sous le règne du soussou Lansana Conté, avaient leurs bouches dans le sac et qu’ils n’osaient pas parler leur langue maninka à Conakry. Avant d’ajouter que si les Malinkés s’asseyent jusqu’à ce qu’il quitte le pouvoir, ils vont subir pire que ce qu’ils ont subi en 1985.

Ainsi, nous avons promis aux Guinéens de lutter contre le régime incompétent, injuste et ethnocentrique du RPG d’Alpha Condé. Un homme digne, c’est un homme qui honore ses engagements.

Malheureusement, je n’ai pas les moyens de mener convenablement le combat et l’ennemi est prêt à tout; mais je ne vendrai pas pour autant mon âme au diable.

Voilà pourquoi, moi Sadio Barry, je ne pouvais rallier Alpha Condé qui a socialement déchiré le pays, qui continue de torpiller le processus électoral et qui ne respecte ni la Constitution ni des accords signés.

Allemagne, le 16 septembre 2015

  1. Sadio Barry

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