Nous nous faisons le devoir de publier à nouveau cet article datant du 21 juillet 2015, soit 4 mois avant la dernière sortie médiatique du président Alpha Condé qui a promis de constituer son deuxième gouvernement sur le fondement de la compétence. Dans cet article de monsieur Sylla Abdoul, des passages soulignaient la nécessité de donner la primauté aux techniciens plutôt qu’aux politiciens dans la gestion de l’administration guinéenne. Comme quoi, on peut estimer que le président Alpha Condé a mis du temps pour s’en rendre compte. Bonne lecture.
Dans quelques mois le mandat dévolu par le peuple de Guinée au professeur Alpha Condé arrivera à échéance. Il devra donc renouveler son bail
Nous allons nous atteler à faire un « flashback » des cinq (5) dernières années. D’abord dans un premier temps nous devons saluer le couronnement de parcours d’un homme qui s’est inlassablement battu pour la démocratie dans notre pays, parfois au risque de sa vie. Si son arrivée au pouvoir a suscité beaucoup d’espoir, force est de constater que cet espoir s’est transformé en désappointement en dépit de quelques embryons d’infrastructures et de réformes structurelles.
Sur le plan politique : Nous vivons une situation de crispation politique qui est à l’origine des différents troubles dans notre pays notamment dans la haute banlieue de Conakry au niveau du fameux axe « Hamdallaye-Bambéto-Cosa ». Le gouvernement a été incapable d’organiser des élections législatives et communales dans les délais légaux. Il a fallu trois (3) ans et soixante (60) morts pour que soient organisées des élections législatives. Les élections communales ne sont toujours pas organisées: Les dernières remontant à 2005. Depuis l’avènement du professeur Alpha Condé, les maires et les conseillers municipaux ont été remplacés par des délégations spéciales favorables au parti au pouvoir. Les mandats des dites délégations qui se prolongent depuis plus de quatre (4) ans, alors que la loi prévoit une période n’excédant pas six (6) mois. Quand on sait que ce sont ces responsables de délégations spéciales « maires par intérim » qui sont chargés de distribuer les cartes d’électeurs et sans oublier le rôle non négligeable qu’ils jouent dans le processus électoral.
La réconciliation nationale est au point mort. Une situation marquée par la fragmentation du tissu social, le règne de l’impunité, des violations graves et répétées des droits de l’homme.
Une insécurité généralisée qui n’épargne même pas les puissants en témoigne l’assassinat de la directrice générale du trésor public ainsi qu’un ancien ministre de la république. Un climat d’insécurité qui n’encourage pas les investissements étrangers.
L’effondrement de notre système de santé: Le système de santé qui était en mauvais état, est aujourd’hui dans une situation catastrophique. Le régime est incapable d’éradiquer ébola depuis plus de deux(2) ans maintenant, en dépit d’un déploiement exceptionnel de moyen humain et financier (lire notre article: Quand l’amateurisme et l’improvisation font perdurer ébola en Guinée).
Sur le plan social: Nous assistons à une paupérisation généralisée marquée par un chômage endémique ainsi que l’effondrement du pouvoir d’achat des travailleurs du secteur formel (fonctionnaires, travailleurs du secteur privé) et ceux du secteur informel (petits commerçants, hommes et femmes exerçant de petits boulots etc).
Quant à notre économie, nous sommes officiellement entrés en récession économique selon le fonds monétaire international (F.M.I): Le taux de croissance économique de notre pays est négatif c’est à dire inférieur à zéro (0) %. Tandis que nos voisins affichent d’excellents taux de croissance. 7% pour le Mali, près de 10% pour la Côte d’Ivoire, 14 % pour la Sierra Léone, 8 % pour le Libéria. Quand on sait que la croissance économique est le baromètre de l’économie d’un pays, car elle détermine le taux de richesse produit au cours d’une certaine période. Nous ne pouvons juguler le chômage qu’en ayant un fort taux de croissance économique.
Il est de notre devoir d’être plus exigent avec le régime actuel, pour deux (2) raisons principales: d’abord parce qu’il s’agit du premier régime démocratiquement établi de notre pays, ensuite aucun gouvernement en Guinée n’a disposé d’autant de moyens financiers que celui-ci.
Avant d’aller voter, chaque guinéen devrait exiger du gouvernement qu’il justifie l’utilisation d’un certain nombre de fonds notamment, les sept cent (700) millions usd versés à l’Etat par l’entreprise minière Rio Tinto, la centaine de millions de dollars versées par l’entreprise de téléphonie MTN, les prêts de plusieurs dizaines de millions usd de l’Angola et du Congo-Brazzaville. Aussi qu’on nous dise la véritable destination des malettes de billets de banques en dollars et en Euros saisis par la douane sénégalaise sur des officiels Guinéens dont le montant équivalait à deux (2) milliards de Francs CFA.Une somme qui était en partance pour Doubai et qui a finalement pu échappée aux mailles du filet au nom de la raison d’Etat. Qu’il nous justifie les cinq (500) millions usd engagés dans le secteur de l’énergie avec un piètre résultat. Qu’il nous explique l’octroi d’une concession minière du nimba à une entreprise proche de la famille présidentielle: une transaction qui s’est faite en toute opacité et en dehors de toute orthodoxie en la matière. La gestion de « l’ébolathon » c’est à dire de l’argent destiné à éradiquer ébola.
Nous entendons ici et là le gouvernement, ses thuriféraires ainsi que ses ouailles dans leurs poncifs habituels, tenter de faire croire à notre peuple que l’opposition ne connaît pas la politique. Ceci peut être vrai, néanmoins la politique qui est jusque-là appliquée à la Guinée est désastreuse et la conduira inexorablement vers son déclin si le peuple de Guinée renouvelle sa confiance à l’actuelle équipe dirigeante. L’échec de ce quinquennat est à mettre au compte du professeur Alpha Condé, du RPG (rassemblement du peuple de Guinée) ainsi que ses alliés de l’arc-en-ciel. L’élite guinéenne n’est pas comptable de la situation actuelle du pays car elle a été exclue dans sa grande majorité de la gestion de l’Etat. C’est pourquoi chacun devrait se faire violence en domptant en lui le réflexe de toujours voter pour la personne de sa communauté. Cette fois ci il s’agira de choisir la personne capable de nous sortir du bourbier actuel.
Au regard de tout ce qui précède ainsi que des nombreux défis qui nous attendent, nous avons plus besoin de techniciens que de politiciens dans notre pays.
Sylla Abdoul membre de la rédaction du « guepard.net »