En effet, celui-ci et son parti semblent avoir tiré les enseignements de leur participation à maintes alliances et confrontations électorales et bâti une nouvelle stratégie fondée sur une démarche holistique qui inclut tous les facteurs dont les interactions construisent la grille de lecture de la politique guinéenne. Il n’est point nécessaire d’être ni un politicien avisé, ni un politologue talentueux pour constater la « tribalisation » à outrance du système politique, en Guinée, avec ses normes, ses pratiques, ses rouages, etc.. Ce n’est pas par hasard que les deux premières grandes formations politiques s’arc-boutent sur les deux grandes communautés ethnolinguistes du pays. Dès 1992, à l’apparition de la démocratie galvaudée, les principales formations se sont constituées autour de leaders emblématiques et sur des bases incontestablement tribales. Le modèle de société n’inspire plus la conviction et l’appartenance politiques. Loin s’en faut. La fraternité spatio-linguistique s’y est substituée.
Il faut, vaille que vaille, voter pour son « frère » de tribu et de terroir. Peu importe la capacité de celui-ci à exercer le sacerdoce avec le talent, l’excellence et l’efficacité requis ! Les élections présidentielles de 2010 et de 2015 ont persuadé l’UFR et son Président que le chemin de Sékoutouréya est semé de bien d’embûches aussi périlleuses les unes que les autres. Leur stratégie de construire une formation politique centriste d’obédience sociale-démocrate et, dans le contexte guinéen, supra ethnique, a fait long feu. Si la démocratie est l’exercice du pouvoir par et pour le peuple, à travers ses représentants qu’il mandate au moyen du vote, elle ne peut alors être fondée que sur la loi du nombre. Dans les pays comme le nôtre où la démocratie est en construction et les électeurs défavorisés par un faible niveau d’alphabétisation, l’intention des responsables de l’UFR, quoique rationnelle et fort louable, relève de la chimère. Peut-être, les faits leur donneront raison, demain. « Tout vient à point à qui sait attendre ».
L’échec inattendu de l’alliance UFR/UFDG, en 2010, a laissé des stigmates. Le rejet d’une candidature unique de l’opposition proposée par l’UFR a agacé, frustré et écorché responsables et militants de ce parti. La nécessité de formulation d’une nouvelle vision et d’innovations des alliances stratégiques s’est imposée Toutefois, les objectifs sont demeurés les mêmes, constamment structurés autour de la conquête et de l’exercice du pouvoir. Le réalisme a prévalu sur les considérations idéologiques. C’est le triomphe de la realpolitik dont maints politiciens sont coutumiers ici et là, à travers le monde. N’est-il pas de bonne guère que Sidya Touré et son parti tentent de tirer parti de leur position de troisième force politique du pays ? La bonne politique est celle qui intègre dans une même dynamique l’intérêt général (au niveau national) et l’intérêt particulier (au niveau des partis). On peut avancer l’idée que l’actuelle rhétorique et les nouvelles alliances de l’UFR sont l’aboutissement des constats et des réflexions qui précèdent. Comme dit le vieil adage « il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas ».
Kayoko Abraham Doré