Allons- nous vers de nouvelles générations des programmes d’ajustement structurel des années 80 en Guinée ?
A la fiscalité pétrolière qui est entrain de pénaliser fortement les ménages, la loi de finances pour 2016 ajoute de nouveaux impôts et aménage la TVA. Ces nouveautés introduites dans la fiscalité guinéenne semblent faire de l’année 2016 l’une des années les plus difficiles des vingt dernières années.
Les nouveautés introduites par la loi de finances pour 2016 sont :
L’addition fiscalité pétrolière et des ajustements fiscaux introduits par la loi de finances pour 2016 indiquent que l’année 2016 n’est pas une année heureuse ni pour l’économie, ni pour les pauvres, ni pour le gouvernement, encore moins pour l’investissement.
Sur le plan de la fiscalité pétrolière, les gouvernements guinéens semblent trop comprendre la leçon du couple FMI/BM. La recette est simple, à chaque fois que l’État est confronté à des difficultés financières, il faut demander à la fiscalité pétrolière.
En effet, dans un rapport de la Banque Mondiale, on peut lire :
« La nécessité d’accroître les recettes budgétaires aux fins de stabilisation a conduit à l’introduction d’une taxe exceptionnelle sur les produits pétroliers ». Et Vito Tanzi, l’une des têtes pensantes du FMI ajoute : « la suppression d’impôts ou taxes qui nuisent à la croissance n’est pas encouragé si elle ne peut être immédiatement compensée par d’autres ressources… ».
C’est exactement dans cette logique que le gouvernement inscrit son action pour maintenir le prix actuel du carburant à la pompe, sans se soucier des incidences économiques et sociales du prix actuel du carburant.
Pour maintenir le prix du carburant à la pompe, le gouvernement déplace le problème, tout en instaurant un débat inapproprié.
En effet, le gouvernement cherche des arguments en faisant des comparaisons des prix pratiqués dans les pays limitrophes, au lieu d’appliquer la formule sur la flexibilité du prix du carburant à la pompe à savoir, le prix augmente à la pompe si le prix du baril augmente sur le marché international. Le prix baisse à la pompe si le prix du baril baisse sur le marché international.
Pourtant, c’est grâce à cette formule que le prix du carburant a évolué de 4500 à 10.000fg. Mais, les difficultés surgissent quand le prix du baril a commencé à baisser sur le marché international. Au lieu de suivre sa logique précédente de flexibilité du prix et répercuter la baisse du prix du baril sur le prix à la pompe, le gouvernement se permet de le maintenir en violation de sa pratique de flexibilité des prix dont il a largement profité ces dernières années.
II est évident que le maintien du prix actuel du carburant à la pompe et la taxation de certains produits de première nécessité sont des mesures qui sacrifient les programmes de lutte contre la pauvreté et plongent la Guinée dans une situation semblable aux dures mesures d’ajustement structurel imposées dans les années 80 par les institutions financières internationales et qui ont laissé des mauvais souvenir en Afrique et plus particulièrement en Guinée.
Quant aux nouveaux impôts, on peut affirmer sans risque de se tromper que :
– le relèvement du taux de la TVA de 2% découragerait la consommation et entrainerait la baisse de la fourniture des services ou la production des biens taxés.
-l’élargissement du champ d’application de la TVA sur la farine et les huiles alimentaires augmenterait les prix de ces produits et entrainera des conséquences sociales. Comme on le sait, la farine et les l’huiles alimentaires sont des produits de première nécessité. Dans ce sens, ces produits doivent être soit faiblement taxés, soit exonérés et ce, pour éviter l’inconvenant social du prélèvement ;
– la retenue à la source de 50% de TVA facturée par les prestataires et fournisseurs des entreprises publiques, sociétés minières, sociétés de téléphonies et sociétés pétrolières risquerait de compliquer la comptabilité des entreprises et leur trésorerie en cas de TVA négative.
Pourtant, l’alternative aux difficultés liées à la loi de finances pour 2016 existe.
Nous y reviendrons.
Dr KAKE Makanera Al-Hassan
Enseignant chercheur/Université Sonfonia-Conakry