Parmi les 140 personnalités de plus de 200 pays et territoires, citées dans les « Panama papers », les révélations sur l’univers sombre des paradis fiscaux, figure un Sénégalais. Pape Mamadou Pouye. Un proche de Karim Wade. Pour l’instant, un seul Sénégalais figure sur la liste des personnes citées dans les « Panama papers », la plus importante fuite de documents sur l’univers opaque des paradis fiscaux. Il s’agit de Pape Mamadou Pouye, arrêté et condamné en même temps que Karim Wade à 5 ans de prison ferme et à payer 69 milliards de francs Cfa. Il est présenté comme l’un des prête-noms de l’ancien ministre d’État, reconnu coupable d’enrichissement illicite et qui purge depuis le avril 2013 une peine de six ans de prison. Il a toujours réfuté ces accusations. Pape Mamadou Pouye, 46 ans, est un ami d’enfance de Karim Wade. Peu après son arrestation, en avril 2013, le journal Le Témoin lui avait consacré un article dans lequel il est présenté comme un « boy town », qui « était riche bien avant l’arrivée des Wade au pouvoir ». Dans le texte, nos confrères révèlent que Pouye a fait la connaissance de Karim au Cour Sainte-Marie de Hann. Ils étaient dans la même classe. Son Bac G en poche, il s’envole pour la France pour des études en Finances et Audit. Il s’inscrit à l’école de management de Strasbourg. Après avoir décroché son diplôme, celui que ses proches, cités par Le Témoin, classent parmi « les meilleurs auditeurs de sa génération » décroche un poste dans un prestigieux cabinet britannique où il exerce de 1997 à 1999. Avec d’autres experts, il sera sollicité pour la liquidation de la défunte compagnie aérienne belge Sabena, entre autres missions exécutées aux quatre coins du monde. À l’accession de Wade au pouvoir, en 2000, il décide de rentrer au bercail. Il répondait ainsi à l’appel du nouveau chef de l’État aux Sénégalais de la diaspora. Ce retour sera facilité par Karim Wade, selon le journal. Pouye crée, officiellement, AHS (Aviation handling services). Malgré sa discrétion, sa proximité avec les Wade était un secret de polichinelle. Cette proximité lui a valu ses déboires avec la justice sénégalaise. La Crei le considérant comme un simple prête-nom de Karim Wade, présenté comme le véritable propriétaire d’AHS. L’apparition de son nom dans les « Panama papers » conforte-t-elle les accusations contre lui ? Les développements de cette affaire, annoncée comme une série avec plusieurs épisodes par Le Monde, un parmi la centaine de journaux enquêteurs du dossier, permettront peut-être d’y voir plus clair. D’ici là il purge une peine de 5 de prison ferme au Sénégal. Le nom de Pape Mamadou Pouye figure dans le scandale des « Panama papers » aux côtés de plus d’une centaine de personnalités, des figures politiques, des milliardaires et des footballeurs célèbres. Dans ce lot on compte des Africains : Khulubuse Zuma, neveu du Président sud-africain Jacob Zuma, Addo Kufuor, fils de l’ancien président ghanéen John Kufuor, Mamadie Touré, la veuve de l’ancien président guinéen Lansana Conté, Mounir Majidi, le secrétaire particulier du roi du Maroc, Alaa Moubarak, fils de l’ancien président égyptien Hosni Moubarak, Jean-Claude Nda Ametchi, proche de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo, la sœur jumelle du président de la RD Congo, Joseph Kabila, des ministres algérien, angolais et congolais (de Brazza), un général rwandais, etc. Les « Panama papers » sont à ce jour la plus importante fuite de documents sur les paradis fiscaux. Cette affaire porte sur 2600 giga octets de données secrètes, 214 000 entités offshore, 21 paradis fiscaux et des clients de plus de 200 pays et territoires. Elle a mobilisé pendant près d’un an 370 journalistes de plus d’une centaine de médias associés au Consortium des journalistes d’investigation (ICIJ). C’est le quotidien allemand Süddeutsche Zeïtung qui a levé le lièvre. Destinataire de la fuite transmise par une source anonyme, début 2015, le journal avait entrepris de mener l’enquête sur le cabinet Mossack Fonseca, qui administre les 214 000 entités offshore concernées par cette affaire. Devant l’ampleur des données, le quotidien allemand contacte l’ICIJ. Précision importante des journalistes-enquêteurs : toutes les sociétés offshore des « Panama papers » ne sont pas illégales ou opaques. « Certaines ont une activité économique véritable et déclarée ou ont été spécialement créées pour faciliter des investissements internationaux », soulignent-ils. Ce qui les fait dire que dans les paradis fiscaux ciblés l’argent propre côtoie l’argent sale, que l’argent gris (celui de la fraude fiscale) côtoie l’argent noir (celui de la corruption et du crime organisé).
Source: Sud Quotidien de Dakar