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La Turquie: de paria à tête de pont de l’union Européenne (Sylla Abdoul)

avril 23rd, 2016 | par Leguepard.net
La Turquie: de paria à tête de pont de l’union Européenne (Sylla Abdoul)
Article
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La procédure d’adhésion de la Turquie fait suite au dépôt d’une demande d’adhésion à la communauté Européenne le 14 avril 1987. La Turquie est un État tiers associé à l’union Européenne et aux communautés qui l’ont précédée depuis 1963. La Turquie a signé un accord d’union douanière avec l’union en 1995 et a officiellement été reconnue candidate le 12 décembre 1999 lors du sommet Européen d’Helsinki. Les négociations commencèrent le 3 octobre 2005.

 Avant le début des négociations ainsi que celui du dépôt de candidature de la Turquie, des promesses furent prises concernant cette adhésion. Des promesses souvent subordonnées à des « conditions à taux variables » ou à de la procrastination dans la prise de décision finale. Il était perceptible que les agissements des poids lourds de l’union (France, Allemagne…), constituaient un refus implicite de cette demande d’adhésion.

Des partis populistes et même certains partis de gouvernement se sont emparés de la question en se prononçant pour un refus catégorique de ce pays à cheval entre l’Europe et l’Asie dans l’union. Les arguments officiels étaient relatifs à la position géographique du pays, sa démographie, à son déficit de démocratie et des Droits de l’homme en particulier ceux des femmes ainsi qu’à la non reconnaissance du génocide Arménien. Alors qu’en réalité, ce refus était d’ordre sociologique: une frange importante de la société Européenne ne voulant pas d’un pays à majorité musulmane dans l’union.  Le débat ouvert sur ce sujet fit apparaître au grand jour, le dédain d’un certain nombre de politiques Européens pour ce pays pourtant d’une grande richesse culturelle et historique. Au fur et à mesure que le débat avançait, l’opinion Européenne s’alignait massivement derrière le positionnement des antis adhésion de la Turquie à l’Union. Ce dossier devint désormais un mistigri, le président Français d’alors, Jacques Chirac, pourtant favorable au départ à cette adhésion, après avoir subi un revers avec la défaite du oui au projet de réforme constitutionnelle de 2005, décida de couper la poire en 2, en proposant que l’adhésion de la Turquie fasse l’objet d’un référendum. Eu égard à l’hostilité de plus en plus grandissante de l’opinion à cette adhésion, on pouvait aisément comprendre qu’elle n’avait aucune chance d’aboutir. D’ailleurs la Turquie ne s’est pas fait d’illusion même si la procédure est officiellement est en cours.

Depuis quelques années la Turquie est devenue une puissance émergente. Elle a l’avantage d’avoir une position géographique stratégique, bordée par le bosphore, la mer noire, la mer Egée et la mer Méditerranée. Elle s’est désormais tournée vers d’autres partenaires notamment les U.S.A et aussi les BRICS ( Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du sud). Elle est également de plus en plus présente en Afrique, d’où les récentes tournées africaines du président Erdogan. Elle n’a pas connu la crise économique de 2008, elle a une meilleure santé économique que tous les Etats de l’union depuis le début de ladite crise.
Depuis 2011, date de lancement des hostilités en Syrie, il s’agit du pays qui a accueilli le plus de réfugiés en provenance de cet Etat, plus de 2 millions d’hommes, de femmes et d’enfants. Et une grande partie des migrants rejoignant l’Europe par le biais de la Grèce, passent par ce pays. A la lumière de cette réalité, l’Europe confrontée à l’afflux de migrants, n’avait pas d’autres choix que d’engager des négociations avec la Turquie qu’elle avait pourtant éconduit il y a une décennie. Il est indéniable que la Turquie se trouve aujourd’hui en position de force. L’union Européenne, pour contenir cette « vague » de migrants à ses portes, a besoin d’elle.

C’est pourquoi les 28 Etats Européens ont signé avec la Turquie un pacte. En théorie, depuis le 20 mars 2016: date d’entrée en vigueur dudit pacte, tout migrant arrêté en Grèce pourrait être renvoyé en Turquie y compris ceux venant de Syrie. Pour un syrien renvoyé en Turquie, un autre est installé en Europe via le corridor humanitaire à la limite de 72000. La Turquie a pu obtenir l’accélération de sa procédure d’adhésion bloquée depuis le mandat de Nicolas Sarkozy en France et aussi la suppression de visa pour ses ressortissants souhaitant se rendre dans un pays de l’Union à partir de juin 2016, à condition de respecter les 72 critères identifiés par la commission Européenne.

Il est incontestable que la signature de ce pacte marque le retour en force de la Turquie. Qui l’aurait cru ? Comme quoi, la roue de l’histoire tourne.

Abdoul Sylla

Sylla Abdoul, membre de la rédaction du site leguepard.net

 

 

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